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Photo du rédacteurHenry de Lesquen

« Crimes contre l’humanité » : retour de bâton pour Israël

Dernière mise à jour : il y a 2 heures

La cour pénale internationale (CPI) a lancé le 5 novembre 2024 un mandat d’arrêt contre Benjamin Nétanyahou, premier ministre de l’État d’Israël, pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre. On peut contester tant la légitimité de la CPI que la notion de crime contre l’humanité, mais les faits invoqués contre Nétanyahou sont avérés. Cet homme est indiscutablement un criminel au regard des actes accomplis par son armée selon ses ordres contre les malheureux Palestiniens du territoire de Gaza. L’armée israélienne a massacré au moins quarante mille civils, hommes, femmes et enfants, en bombardant des hôpitaux et des écoles, en détruisant des maisons, en ciblant des passants, et ce n’étaient pas ce que l’on appelle pudiquement des « dommages collatéraux ». Il s’agissait bel et bien de tuer des Palestiniens innocents. Aux morts, il faut ajouter les innombrables blessés. De surcroît, les Israéliens ont réduit à la famine, en entravant l’acheminement des vivres, les plus de deux millions de Palestiniens qui vivent à Gaza. Ils les ont privés de tout en détruisant les infrastructures et en empêchant l’entrée de l’aide humanitaire. Il faudrait avoir un cœur de pierre pour ne pas être touché par le malheur des Palestiniens de Gaza et pour ne pas être révolté par les crimes perpétrés par Nétanyahou.

Les crimes de guerre commis par les soldats du Hamas – qui n’étaient pas des actes terroristes – le 7 octobre 2023 n’excusent en rien ceux des dirigeants israéliens. Le fait est que le nombre des victimes est dans le rapport d’un à quarante, mais ce n’est pas la question. La mort d’un innocent justifie la mort de son meurtrier, non celle d’autres innocents.

Pour sa défense, Nétanyahou a eu recours aux procédés les plus éculés en se disant victime de « l’antisémitisme » et en se comparant à Dreyfus. (Lequel était innocent selon lui, bien sûr, comme le veut la doxa. En fait, cet officier juif avait trahi la France et il était coupable, comme l’a démontré définitivement Adrien Abauzit dans un livre magistral sur l’affaire publié en 2018.)

 

L’ironie cruelle, dans ces événements tragiques, c’est que la notion de crime contre l’humanité, en anglais crime against humanity, est un concept ad hoc, élaboré spécialement à l’issue de la seconde guerre mondiale pour dénoncer le génocide des Juifs perpétré par les Allemands. Il a été inscrit dans le statut du tribunal de Nuremberg institué par les vainqueurs en 1945 pour juger les vaincus (en s’abstenant de juger leurs propres crimes, tels que les bombardements de Dresde ou Hirochima). L’expression est en elle-même inconsistante. Si par « humanité », on entend la nature humaine, tout crime, en droit français du moins, est commis contre l’humanité puisque les sévices infligés aux animaux ne sont que des délits. Si par « humanité » on entend le genre humain, on nage dans l’absurdité, puisque les Allemands, qui étaient coupables, appartenaient à l’humanité tout autant que les Juifs, qui étaient victimes. Il aurait donc mieux valu parler de « crime de génocide ».

On a calqué en français le mot anglais « genocide », néologisme inventé par le juriste juif Raphael Lemkin en 1943 pour dénoncer les crimes commis contre les Juifs pendant la dernière guerre. On devrait plutôt dire « populicide », mot employé par Gracchus Babeuf pour désigner l’extermination des Vendéens par la révolution.

Si on a forgé ces termes, c’était dans un but de propagande, pour faire accroire que l’extermination de six millions de Juifs par les Allemands, qui a été jugée par le tribunal de Nuremberg, était un événement exceptionnel, sans précédent. Or, hélas, les populicides ou génocides ont été monnaie courante dans l’histoire. On se souvient du populicide arménien de 1915 accompli par les Turcs. On sait maintenant que le communisme a fait plus de cent millions de morts. On sait aussi, en particulier, que le slavocide, extermination des Slaves russes, ukrainiens ou biélorusse, entre 1917, révolution bolchevique, et 1953, mort de Staline, a fait au moins dix-huit millions de morts, trois fois six, et que les criminels qui l’ont commis étaient en grande majorité des Juifs, de Trotski à Kaganovitch en passant par Yagoda, comme l’a montré Soljénitsyne dans L’archipel du Goulag.

Pourtant, par le bourrage de crâne, on avait fini par assimiler crime contre l’humanité et génocide au sort tragique des Juifs victimes de ce que l’on a appelé plus tard Holocauste ou Shoah.

La France a de nouveau une religion officielle, c’est la religion de la Choah (en orthographe française), laquelle est protégée contre l’hérésie et le blasphème par la loi Gayssot du 13 juillet 1990. Reniant les principes du droit pénal selon lesquels, d’une part, la loi pénale est d’interprétation stricte et, d’autre part, le doute doit bénéficier à l’accusé (in dubio pro reo), la cour de cassation condamne même la minimisation du génocide et l’insinuation d’un doute. Le délit d’opinion a donc une extension maximale.

On a quand même appliqué la notion de crime contre l’humanité à d’autres populicides ou génocides, mais il semblait établi que le génocide commis contre les Juifs n’avait pas d’équivalent et que ceux-ci ne pouvaient être considérés que comme des victimes.

Le mandat d’arrêt lancé par la CPI contre Nétanyahou est donc d’une ironie tragique et représente un sacré retour de bâton pour les Israéliens, qui avaient pu jusqu’alors perpétrer tous ses crimes à l’abri de leur statut de victime historique.

 

Il faut savoir, en effet, qu’Israël est un État criminel ab ovo. La Palestine était la patrie des Palestiniens et les Juifs sionistes les en ont dépossédés grâce à un effroyable nettoyage ethnique. Comme l’a remarqué Hermann Hoppe, les Juifs ont acquis régulièrement tout au plus 10% des terres qu’ils détiennent actuellement. Tout le reste a été pris aux légitimes propriétaires palestiniens, qui ont été spoliés. Lors de l’indépendance d’Israël, en 1948, toutes ces horreurs ont été bénies par les grandes puissances, les États-Unis, l’URSS, la France, par toute la « communauté internationale », sauf par les pays musulmans. Il est vrai que l’on était moins bien informé qu’aujourd’hui, mais cette bienveillance était surtout inspirée par le souvenir de la Choah. Il semblait que les Juifs avaient droit à une réparation, alors même que les pauvres Palestiniens n’avaient été pour rien dans les malheurs des Juifs.

Il va de soi pour quiconque a une once d’objectivité que les Juifs n’avaient aucun droit sur le territoire de la Palestine. Ce pays ne portait même pas leur nom ! Pour les Grecs, puis pour les Romains, c’était le pays des Philistins, l’un de ces « peuples de la mer », ainsi que les désignaient les Égyptiens, qui ont ravagé le Proche-Orient au XIIe siècle av. J.-C. et qui étaient des Gréco-Phrygiens, donc des Indo-Européens. Les Philistins s’étaient installés autour de Gaza et leurs cités ont été détruites par les Assyriens vers 600 av. J.-C. Mais leur nom est resté à cette terre, ce qui prouve le peu de cas que l’on faisait jadis des Israélites, Juifs ou Samaritains. À l’époque du Christ, comme on sait, les Juifs peuplaient surtout la Judée, ancien royaume de Juda, qui faisait à peine le tiers de la Palestine. An nord, la Galilée avait une population mélangée. Entre les deux, la Samarie, ancien royaume d’Israël, était donc peuplée, non de Juifs, mais de Samaritains, que les Juifs détestaient. On se demande bien à quel titre les sionistes ont réclamé la Samarie et on s’étonnera qu’ils aient donné à l’État qu’ils ont fondé le nom d’Israël, celui du royaume des Samaritains ! Il est bon de ne pas oublier ces réalités historiques, mais, en vérité, elles ont peu de poids, car, même si les sionistes n’avaient revendiqué que la Judée, on voit mal comment ils pouvaient le faire deux mille ans après avoir quitté les lieux. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y avait prescription !

Les sionistes expliquaient que Yahvé leur avait donné la Terre promise, selon le récit pseudo-historique du Tanakh, la Bible hébraïque, et qu’elle leur revenait donc de plein droit. Cet argument tiré de leur propre religion ne pouvait aucunement être opposé aux non-Juifs et, au premier chef, aux Palestiniens, que l’on voulait déloger. Pour un chrétien, la Nouvelle Alliance a aboli l’Ancienne et ces prétentions sont irrecevables – sauf pour quelques sectes protestantes extravagantes des États-Unis pour lesquelles le retour des Juifs en Palestine pourra hâter l’avènement du Messie à la fin des temps… Pour celui qui n’est ni juif ni chrétien, l’invocation à Yahvé est encore moins pertinente. Le pire, c’est que pour les Juifs religieux eux-mêmes, le retour dans la Terre promise n’aurait dû se faire qu’avec la venue du Messie, si bien que les Juifs vraiment orthodoxes continuent à dénier toute légitimité à l’État d’Israël. (Pour être complet, on mentionnera les hérétiques sabbatéens : ils croient que Sabbataï Zevi, qui a vécu au XVIIe siècle, était le Messie.)

Le comble, cependant, c’est que les Juifs actuels ne descendent pas des anciens Hébreux ni des Juifs qui vivaient en Palestine à l’époque du Christ. Comme l’ont montré Ernest Renan, Arthur Koestler (La treizième tribu) et Shlomo Sand (Comment le peuple juif fut inventé), les Juifs achkénazes descendent des Turcs khazars, convertis au judaïsme au VIIIe siècle, les Séfarades, de Berbères convertis au Ve siècle.

Mais alors, demandera-t-on, que sont devenus les Juifs du Ier siècle ? La solution est simple. Contrairement à la légende, il n’y a pas eu d’exil après la destruction du temple de Jérusalem par Titus en l’an 70. La meilleure preuve, c’est qu’il y a eu une autre révolte juive, dirigée par Bar Kochba, en 135. Les Israélites, Juifs ou Samaritains, sont restés sur place, mais ils se sont convertis au christianisme, puis à l’islam. Il n’y a pas eu de grand remplacement. Ce sont les Palestiniens actuels qui en descendent. Ce sont eux, et eux seuls, qui sont les autochtones de la Palestine. Les sionistes ont insolemment usurpé leurs droits.

Le goût de la domination que l’on prête aux Juifs, s’il peut être encouragé par la lecture de la Bible hébraïque, qui donne un récit pseudo-historique de la conquête sanglante de la « Terre promise », provient en fait de leur atavisme turc. Cette ascendance turque peut expliquer la brutalité et la cruauté de la conquête de la Palestine par les Juifs sionistes, qui étaient des Achkénazes et qui reproduisaient, à une échelle bien modeste, celles que les Turcs ont faites depuis deux millénaires. Les Juifs pouvaient assurément relever dans la Bible hébraïque moult exemples de populicides pseudo-historiques ordonnés par Yahvé, dieu des Juifs, ou bénis par lui, mais c'est bien plutôt dans leur atavisme turc qu’ils ont trouvé la volonté et l’énergie de s’emparer d’un territoire en éliminant ses habitants autochtones sans une once de pitié. C’est aussi ce qui explique la manière dont les Israéliens ont réagi aux massacres effectués par les Palestiniens du Hamas le 7 octobre 2023. Si Benjamin Nétanyahou a commis ces crimes qui lui ont été imputés par la CPI, il n’a pas agi tellement selon la leçon de la Bible hébraïque, mais bien plutôt selon l’atavisme turc qu’il partageait avec ses concitoyens achkénazes.

 

Faut-il en conclure que la France devrait soutenir le combat des Palestiniens contre Israël ? Ce serait une erreur, car la morale ne se confond pas avec la politique. Oui, nous avons un devoir moral de tenter de soulager les souffrances des Palestiniens par une aide humanitaire, dans la mesure de nos moyens. Mais non, nous ne devons pas nous impliquer dans le conflit israélo-palestinien. Nous avons tout intérêt à rester neutres. Nous ne sommes pas des Palestiniens et nous devons admettre que la conquête crée des droits. Soixante-seize ans après la fondation de l’État d’Israël, et bien davantage encore depuis les débuts de l’entité sioniste à la fin du XIXe siècle, il faut reconnaître le fait accompli. Faut-il soutenir la création d’un État palestinien ? Même pas, puisqu’il y en a déjà deux, Gaza et la Jordanie. La solution logique, c’est de reconnaître, d’une part, que Gaza doit être un État indépendant, d’autre part, que la Jordanie, ex-Transjordanie, dont la population est en majorité palestinienne, est un État palestinien, qui devrait recouvrer ses droits sur la Cisjordanie. La reconnaissance du fait accompli implique de reconnaître Jérusalem comme capitale de l’État juif, ainsi que l’annexion du Golan, pris à la Syrie. La négociation devrait porter seulement sur le partage de la Cisjordanie entre Israël et la Jordanie.

1 commentaire

1 Comment


Calamity Jane
il y a un jour

je pense que ça n'empêchera pas Netanyahou de dormir... tout comme pour Poutine, on se fiche un petit peu de ce que pense la CPI, l'ONU, le WEF, le WWF, l'OMS, le G20, le GIEC, etc.

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